Le Père Noël

À Anne

Le soir faisait une ronde bleue
autour des fenêtres 

Les montagnes,
les arbres,
les maisons,
tour à tour entraient dans la ronde
et devenaient bleus 

Tout est complètement bleu quand le Père Noël s’éveille

Il s’est perdu ! 

Tellement perdu, sans maison, sans chemin, sans même un petit caillou blanc, perdu emporté comme une balayure par le vent,
emportées ses bottes,
emportés son manteau, ses cheveux, sa barbe, perdus ses jambes et ses bras, son ventre, sa figure, il a même perdu son nom, personne ne l’appelle plus le Père Noël, d’ailleurs il n’y a personne, il n’y a personne nulle part 

Et nulle part est tout bleu, tout bleu, tout bleu,
il se dit qu’on serait bien là pour dormir
mais il n’a plus sommeil
(depuis un an qu’il dormait) 

Qu’est-ce qu’il pourrait bien faire,
avec ce bleu ? 

Il décide
d’en faire des lunettes ! 

Heureusement, à nulle part, c’est facile de faire des lunettes avec du bleu.
Il faut regarder, bien regarder tout grand tout rond, tourner pour entourer le bleu
et bientôt
les lunettes sont prêtes ! 

Ah quel bonheur, il se dit,
je vais retrouver mon chemin,
et mon corps, et ma maison,
là-bas
un petit caillou blanc
Oh c’est une étoile...
elle sent les pommes cuites !
mais c’est l’heure du dessert ici !
il se frotte les mains sur les genoux...
Mes genoux ! 

Et mes mains !
C’est ainsi qu’il retrouve ses mains, ses genoux, son assiette devant lui
Il entend qu’on l’appelle dans son dos
Eh Jacques, tu dors ?
Eh Jacques Durand !
Oh, se dit-il, j’ai retrouvé
mon nom, Jacques Durand
Mais non je ne dors pas, elles sont bonnes ces pommes ! 

Autour de la table, les enfants font leurs commandes au père noël
Il verra bien ce qu’il peut faire, pense-t-il
et c’est l’heure de se coucher. Il est bien content de retrouver son lit.
Mais comme il n’a toujours pas sommeil,
il commence à s’impatienter
dans le lit de Jacques Durand
et dans le corps de Jacques Durand il commence à s’énerver,
parce que dans la tête, dans la tête de Jacques Durand il y a beaucoup de bruit, beaucoup de bousculade, de papiers brillants, de courses à faire et de sous à dépenser,
il voit rouge
Il ferme les yeux
et tout disparaît.

Il se retrouve nulle part
loin de tout
et nulle part est tout blanc
tout blanc, tout blanc !
Qu'est-ce qu'il pourrait bien faire,
avec ce blanc ?

Il décide d'en faire un tapis !
Heureusement, à nulle part, c'est facile de faire un tapis avec du blanc.
Il faut regarder, bien regarder dans tous les sens et de tous les côtés
et bientôt
un grand tapis blanc
s'étend comme un manteau
Enfin tranquille !
se dit le Père Noël
je vais retourner sur la Terre

Et il se laisse tomber en silence, un peu partout
il neige ! 

Les gens sur la Terre
en récupèrent un morceau
et s’écrient au
matin de Noël :
il est passé ! il est passé !
venez voir ! il est passé ! 

Les enfants ont regardé partout
émerveillés
mais
évidemment le Père Noël
...
Il avait encore disparu !

1 commentaire:

anne a dit…

que c'est joli ! que du bleu, que du bleu, du bleu de nulle part ... et du blanc...et un Papa Père Noël ... à moins que ce soit un Père Noël Papa... heureusement, à nulle part, il est facile de ne plus savoir où commence l'un, où finit l'autre… et la magie opère !

merci pour ce joli conte qui rebondit et donne envie de lire joyeusement à haute voix , presque de chantonner !